Ma première expérience à JES

Du 28 décembre 2018 au 4 janvier 2019, je me trouvais au milieu de nulle part, dans un petit patelin qu’on nomme Storkow, tout ça dans le but de participer à JES, la rencontre espérantiste annuelle, dans le cadre de mon service civique. J’ai tenu un journal de bord tout du long de ce séjour, et il est temps aujourd’hui de résumer tout ça en un article pour vous faire part de ma première expérience à JES.

C’est assez difficile à expliquer, mais JES se trouvait dans un grand terrain pour colonie de vacances. C’est-à-dire qu’il y avait le bâtiment principal, où se trouvait l’accueil et le manĝejo (là où on mange), et d’autres bâtiments qui, soit servaient uniquement de dortoir, ou alors de dortoir et de lieux de rencontre, parmi lesquels on pouvait compter les salles dédiées aux conférences, la bibliothèque, le trinkejo (là où on boit), et le gufujo (là où on ne boit pas). Du coup, si vous vous réveillez dans votre chambre et que vous voulez manger le petit déjeuner au manĝejo, vous devez marcher quelques secondes, voire, quelques minutes, dans le froid de Storkow. On a d’ailleurs eu droit à de la neige à plusieurs reprises, et cela faisait longtemps que je n’avais pas eu de neige, comme j’habite à Toulouse. C’était agréable. 

Vous allez tout d’abord vous poser la question de votre confort personnel : où êtes-vous logé, avec qui, etc. Pour commencer, une chose est bonne à savoir : un espérantiste sur deux à JES, à la manière d’un démarrage forcé d’avion à réacteur, ronfle. Vous voilà prévenus. Heureusement, les organisateurs de JES ont pensé à tout, et vous aurez droit à des boules quiès presque utiles. Presque. Munis de vos boules quiès, de votre petit sac bleu avec inscrit « JES » dessus, de votre clé, votre badge, et tout le tralala, vous allez pouvoir vous rendre à votre chambre. Les quelques chambres que j’ai pu voir pendant mon séjour sont toutes très agréables, bien qu’à peine un peu mal isolées (mention spéciale aux chambres se trouvant dans le même bâtiment que le trinkejo). Heureusement, les organisateurs de JES sont assez flexibles, et vous aurez tout à fait le droit de vous faire muter de chambre si, je ne sais pas, moi, par exemple, si vous vous retrouvez dans une des chambres près du trinkejo et que vous ne parvenez pas à trouver le sommeil à cause de tous ces gens occupés à faire la fête (et c’est leur droit !). J’ai pu donc être logée dans une espèce de loft déjà habité par quatre espérantistes. Rappelez-vous la règle : un espérantiste sur deux ronfle à JES. J’ai donc eu deux avions à réacteur dans ma chambre pendant une semaine. Mais de très gentils avions à réacteur, pour leur gouverne. 

L’heure du repas est assez stricte : de 9h à 10h le matin, de 14h à 15h le midi, et de 19h30 à grosso modo 20h30. Petit conseil : ne soyez pas trop capricieux en ce qui concerne ce que vous allez pouvoir vous mettre sous la dent ! Car, même si vous avez droit à un self-service, vous n’aurez pas beaucoup le choix, et attendez-vous surtout à toujours manger de la nourriture tout juste passable. Pour ma part, je ne me suis jamais sentie vraiment rassasiée à la fin de chaque repas, entraînant un agacement perpétuel due à ma faim qui jamais ne cessait. Astuce : mangez du pain.  

Pendant la journée, vous allez devoir (ou pas, et c’est votre droit) trouver des choses à faire, des activités. A côté du manĝejo se trouvait un grand panneau avec marquées les différentes activités proposées pour la journée, et où est-ce qu’elles se dérouleraient. Globalement, en une journée, vous allez avoir le choix entre plusieurs conférences (dont « doit-on continuer à manger des bananes », « la politique au sein de l’espéranto », « la question de l’éducation en espéranto », et tant d’autres), un cours pour les débutants et un cours plus avancé, une programmation de film (grâce à laquelle j’ai pu revoir OSS 117 et The Truman Show, ou découvrir l’abominable film The Room que, bizarrement, je vous conseille). Je tiens à dire d’ailleurs qu’il est assez pédagogique de regarder des films que vous comprenez oralement (pour ma part, le français et l’anglais), tout en ayant la possibilité de lire les sous-titres en espéranto. Deux excursions pour Berlin ont également été organisées, mais m’étant inscrite trop tard, toutes les places étaient déjà prises. D’après ceux qui y sont allés, l’excursion manquait d’organisation et finalement, ils n’ont pas pu visiter grand-chose. Mon reproche majeur (mais cela n’engage que moi) est que la plupart des conférences ou des discussions n’étaient vraiment pas intéressantes, et lorsqu’elles l’étaient, mon niveau encore approximatif d’espéranto ne me permettait pas de comprendre toutes les subtilités dites durant ces rencontres. Sinon, si les conférences ne vous intéressent pas et que vous aimez le contact humain (et vous allez avoir besoin d’aimer ça dans une rencontre espérantiste), vous pouvez toujours vous rendre au manĝejo et discuter avec les gens ou jouer à des jeux espérantophones avec les autres ou les deux. J’ai, pour ma part, beaucoup apprécié ces jeux : kvin bovinoj, qui résultent d’un mélange entre un jungle speed et un cours de maths, ou d’autres jeux de rapidité dont j’ai oublié les noms mais qui m’ont vraiment beaucoup plu. Des concerts avaient lieu chaque soir, que ce soit dans le manĝejo ou dans le gufujo, et je dois dire que les espérantistes ne manquent pas de talent ! Chaque concert était très sympa. Évidemment, lors du soir du nouvel an, le bal de la Saint Sylvestre a eu lieu comme cela semble être le cas chaque année, l’occasion donc de danser sur de la musique plus ou moins à votre goût. 

Je pense avoir fait le tour, alors venons-en à la conclusion. C’est une sacrée expérience que de participer à JES, même si je n’y retournerai pas, parce que, c’est pas mon truc. Les premiers jours, je me sentais dépaysée, car, en plus de ne pas savoir où je me trouvais sur une carte du monde, je me retrouvais dans un lieu inconnu, avec des gens que je ne connaissais ni d’Adam ni d’Eve, avec lesquels je devais communiquer par le biais d’une langue que je ne maîtrisais pas encore très bien. Passées les premières heures à se demander ce qu’on peut bien faire ici, on s’habitue assez vite grâce à l’atmosphère bienveillante et festive de cette rencontre. J’ai bien aimé les petites subtilités, comme, par exemple, mettre une enveloppe avec son nom dessus dans le bâtiment principal pour recevoir des petits mots gentils, le fait que tout le monde soit heureux d’apprendre à se connaître – cela change de l’individualisme habituel de la société – et d’autres petites choses qui seraient durs à expliquer sans que vous ne l’ayez vécu.

Donc, même si je ne retournerai pas à JES, je peux vous dire que cette expérience vaut le coup d’être vécue, et ne peux que vous encourager à y prendre part.

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